Anne Sylvestre
L'ÉTERNELLE HISTOIRE


C'est une fille qui n'aimait pas,
N'aimait pas celui qui, pour elle
Se mourait d'amour tout bas,
Celui qui était fidèle
Quand on lui demandait pas.

Quand on aime à en crever,
On est toujours ridicule.
Quand on aime à en crever,
On ferait mieux de se cacher.
On est là, comme un voleur,
Avec les yeux qui vous brûlent.
On est là comme un voleur
Avec son putain de coeur.

Mais la fille n'aimait pas
Tout ce qu'il gardait pour elle.
Elle allait à petits pas
Tandis qu'il avait des ailes
Dont il ne se servait pas.

On est toujours en prison
Quand on aime, quand on aime,
On est toujours en prison
Quand on aime avec déraison.
On est toujours à côté.
On est toujours à la traîne.
On est toujours à côté.
Quand on ne vit plus qu'à moitié.

Mais il vivait comme ça
Sans plus rien attendre d'elle
Que la trace de ses pas,
Que le bruit de ses dentelles
Quand elle passait par là.

Combien de coups de couteau
Pour qu'un coeur enfin s'arrête,
Combien de coups de couteau
Pour qu'il dépose son fardeau?
Pendant qu'il se défaisait,
Elle était pas à la fête.
Pendant qu'il se défaisait,
Croyez pas qu'elle s'amusait

Car la fille aimait tout bas
Celui qui n'avait pour elle
Qu'un amour du bout des doigts,
Qu'un amour de passerelle
Quand elle y était en croix.

On pourrait bien déclarer
Que ce n'était que justice.
On pourrait bien déclarer
Qu'elle ne l'avait pas volé.
Si ça vous tombe dessus
Sans que rien vous avertisse,
Si ça vous tombe dessus
Vous ne jugerez pas non plus.

La chanson s'arrête là
Mais l'histoire est éternelle
Et je pense quelquefois
Qu'elle aurait pu être belle
Si l'amour n'existait pas.


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