Georges Chelon
LA STATUE



Dans mon jardin, dans un coin sombre
A l'abri des regards du monde
Dans une niche de pétales
De feuilles tendres aux teintes pâles
Sur un socle d'amour déçu
De toi, j'avais élevé la statue

D'un bronze chaud elle était faite
Et ses courbes étaient parfaites
La Vénus de Milo, pour moi
Aux genoux ne l'atteignait pas
Je l'aimais comme on aime un dieu
Je ne la touchais que des yeux
C'est vrai que j'étais encore fou
C'est vrai que j'étais encore niais
Pour penser qu'elle me remerciait
De me voir presqu'à ses genoux

Faut dire que je ne savais pas
Faut dire que je n'ai su qu'après
Que les filles aiment avant tout
Se retrouver sur des genoux

Dans mon jardin, y'a des coins sombres
Où s'y entasse tant de monde
Que l'herbe n'y peut plus pousser
Les filles viennent s'y coucher
Les filles viennent s'y prêter

C'est dire que tu peux revenir
Toi que je n'osais pas aimer
Mais prépare-toi à gémir
Tu vas trouver à qui parler
Et n'emporte rien avec toi
Car je ne te garderai pas
Les filles qui passent par chez moi
Vraiment ne m'intéressent pas

Dans mon jardin, dans un coin sombre
A l'abri des regards du monde
Dans une niche de pétales
De feuilles tendres aux teintes pâles
Sur un socle d'amour déçu
J'avais élevé ta statue


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