Georges Brassens
HONTE À QUI PEUT CHANTER



En mil neuf cent trente-sept que faisiez-vous mon cher.
J'avais la fleur de l'âge et la tête légère,
Et l'Espagne flambait dans un grand feu grégeois.
Je chantais, et j'étais le seul "Y a de la joie".

REFRAIN:
Honte à cet effronté qui peut chanter pendant
Que Rome brûle, elle brûle tout le temps...
Honte à qui malgré tout fredonne des chansons
A Gavroche, à Mimi Pinson.

Et dans l'année quarante mon cher que faisiez-vous?
Les Teutons forçaient la frontière, et comme un fou,
Et comme tout un chacun, vers le Sud, je fonçais,
En chantant "Tout ça, ça fait d'excellents Français".

REFRAIN

A l'heure de Pétain, à l'heure de Laval,
Que faisiez-vous mon cher en plein dans la rafale?
Je chantais, et les autres ne s'en privaient pas,
"Bel ami", "Seul ce soir", J'ai pleuré sur tes pas".

REFRAIN

Mon cher, un peu plus tard, que faisait votre glotte
Quand en Asie ça tombait comme à Gravelotte?
Je chantais, il me semble, ainsi que tout un tas
De gens, "Le déserteur", "Les croix", "Quand un soldat".

REFRAIN

Que faisiez-vous mon cher au temps de l'Algérie,
Quand Brel était vivant qu'il habitait Paris?
Je chantais, quoique désolé par ces combats,
"La valse à mille temps" et "Ne me quitte pas".

REFRAIN

Le feu de la ville éternelle est éternel.
Si Dieu veut l'incendie, il veut les ritournelles.
A qui fera-t-on croire que le bon populo,
Quand il chante quand même, est un parfait salaud?

REFRAIN


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