François Béranger
MANIFESTE


On m'a dit fais des chansons comme-ci
On m'a dit fais des chansons comme ça
Mais que surtout ça ne parle jamais
De choses vraies tellement vulgaires
Comprenez-vous cher ami entre nous
La réalité faut un peu l'arranger
La réalité vous savez comme c'est
Bien souvent dégueulasse
Non dans une chanson pour faire des ronds
Il faut créer des images illusion
Pour faire avaler aux pauvres couillons
Leur ennui quotidien.
Viens mon amour ma joie
Sur la colline aux senteurs orientales
On va sûrement rencontrer Jésus-Christ
Dans un caleçon à fleurs de Monoprix
Il aura sa plus belle auréole
En plastique à dentelles mécaniques.

Rien jamais sur notre quotidien
Sur toutes les choses qui font que l'on est
Bien manipulés bien conditionnés
Par une bande de requins
Rien de changé depuis la Communale
Où pendant des années on bourre le crâne
Aux enfants à grands coups de programmes
Pour qu'ils soient bien dressés
Rien de changé dans les usines
La gueule des mecs de l'équipe de nuit
Qui vont dormir quand le soleil se lève
Exténués abrutis
Les petites fleurs les petits oiseaux
Les petites filles de français moyens
Les grosse bagnoles et les belles motos
Pour superviriliser nos minets
Belle fille heureuse dans son corps
Grâce au tampon Higiénix qui ne fuit pas

Rien de changé depuis l'Algérie
Sinon que maintenant il est permis
D'en parler et de gagner des sous
Avec des millions de cadavres
Rien de changé depuis un tabassage
A la matraque un quatorze juillet
Pour avoir osé chanter et danser
Quand c'était interdit
Rien de changé depuis qu'un soir j'ai pissé
Sur ma télé tellement c'était chouette
Et bien sûr toute l'électricité
M'est passée dans la quéquette
Bonsoir téléspectateurs
Ce soir sur la deuxième chaîne couleurs
Dans notre série que la vie est belle
Notre grande enquête sur les mirabelles
Et puis avant d'aller au dodo
Championnat du monde de gros lolos

Rien de changé pour la fille de treize ans
Avec ses petits seins et son visage d'enfant
Qui accouche terrorisée
Dans les chiottes d'un lycée
Comme dirait un copain à moi
Un peu fou même complètement fou
Qu'est-ce qu'on attend pour tout arrêter
Tout casser et recommencer
Alors moi vous comprenez
Les violons les guimauves les flonflons
Je trouve ça tellement anachronique
Que ça me file la colique
Je sais bien qu'une chanson
C'est pas tout-à-fait la révolution
Mais dire les choses c'est déjà mieux que rien
Et si chacun faisait la sienne dans son coin
Comme on a les mêmes choses sur le coeur
Un jour on pourrait chanter en choeur
AD LIB


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