François Béranger
ANTONIO


Antonio,
Fils de Borges-Peïnado,
Le marchand de chevaux,
La lame de Tolède
Dans sa ceinture d'argent,
Attend que le rival
Descende de chez sa belle.
Statue d'ombre, ne sent
Ni le froid ni le temps,
Et parle aux étoiles.
Dans la rose lumière
De six heures apparaît
Le bellâtre béat,
Les bottes à la main.
Antonio se montre:
- Mets tes bottes, maricon!
Allons vers l'écurie.
Le rival, dos au mur,
Est livide comme la mort.
De son ventre clapote
Un gargouillis infâme:
Le rival se relâche!
- Tu pues, enfant! Retourne
Chez ta mère! Qu'elle te lave!
Je ne salirai pas
Ma lame de Tolède
Dans un pot de chambre!
Antonio s'en va
En riant au soleil.
Ce soir il écrira
Un tango.


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