Alain Barrière
LES YEUX D'ELSA

Poème d'Aragon


Tes yeux sont si profond qu'en me penchant pour boire
J'ai vu tous les soleils y venir se mirer
S'y jeter à mourir tous les désespérés
Tes yeux sont si profond que j'y perds la mémoire

A l'ombre des oiseaux c'est l'océan troublé
Puis le beau temps soudain se lève et tes yeux changent
L'été taille la nue au tablier des anges
Le ciel n'est jamais bleu comme il est sur les blés

Tes yeux dans le malheur ouvrent la double brèche
Par où se reproduit le miracle des rois
Lorsque le coeur battant il virent tout les trois
Le manteau de Marie accroché dans la crèche

Une bouche suffit au mois de mai des mots
Pour toutes les chansons et pour tous les hélas
Trop peu d'un firmament pour des millions d'astres
Il leur fallait tes yeux et leurs secrets gémeaux

L'enfant accaparé par les belles images
Écarquille les siens moins démesurément
Quand tu fais les grand yeux je ne sais si tu mens
On dirait que l'averse ouvre des fleurs sauvages

Cache t-il des éclairs comme cette lavande
Ou des insectes défont leurs amours violentes
Je suis pris au filet des étoiles filantes
Comme un marin qui meurt en mer en plein mois d'août

J'ai retirer ce radium de la pechblende
Et j'ai brûlé mes doigts à ce feu défendu
Ô paradis cent fois retrouvé reperdu
Tes yeux sont mon Pérou ma Golconde mes Indes

Il advint qu'un beau soir l'univers se brisa
Sur des récifs clairs orageuses enflammèrent
Moi je voyais briller au dessus de la mer
Les yeux d'Elsa les yeux d'Elsa les yeux d'Elsa


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