Georges Moustaki
LES ORTEILS AU SOLEIL


Je laisse jouer mes orteils
Dans les trous de mes espadrilles
Pour qu'ils voient un peu le soleil,
Comment qu'il brille.

Pendant ce temps-là je baye aux corneilles.
Oh! ce n'est pas que je m'ennuie,
Mais je passe des nuits sans sommeil
Avec les filles.

Au petit jour
Les filles rentrent chez elles
Comme les hirondelles
Quand l'hiver est de retour.

Je reste là
Sans trop savoir que faire.
Je me allonge dans les fougères
Sans rien faire et voilà.

Je laisse jouer mes orteils
Dans les trous de mes espadrilles.
Moi, j'ai un faible pour le soleil
Et pour les filles.

Quand j'aurai plus du tout d'oseille
Et mangé ma dernière myrtille,
Quand j'aurai bu toutes mes bouteilles
Jusqu'à la lie...

Quand je pourrai plus prendre aux abeilles
Un rayon de miel pour mes tartines,
Je dormirai sous le soleil
Et qui dort dîne.

Rêvant tout haut
Du pays des merveilles
Où mes joyeux orteils
Seront toujours au chaud...

Rêvant à celle
Qui m'offrira sa bouche,
Son corps et puis sa couche
Et ses baisers de miel,

Je laisse jouer mes orteils
Dans les trous de mes espadrilles.
Moi, j'ai un faible pour le soleil
Et pour les filles,

C'est pourquoi j'irai à Marseille
Ou m'embarquerai pour les Antilles.
Paraît que là-bas c'est plein de soleil
Et plein de filles.


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