Maxime Le Forestier
JEANNE MARTIN
G. Brassens - J. Bertola


La petite presque île où jadis, bien tranquille
Moi je suis né natif, soit dit sans couillonnad
Avait le nom d'un adjectif démonstratif

Moi, personnellement que je meure si je mens
Ça m'était bien égal j'étais pas chatouillé
J'étais pas humilié dans mon honneur local

Mais voyant de l'infamie dans cette homonymie
Des bougres s'en sont plaints tellement que bientôt
On a changé l'orthographe du nom du patelin

Et j'eus ma première tristesse d'Olympio
Déférence gardée envers le père Hugo

Si faire se peut attendez un peu
Messieurs les édiles, que l'on soit passé
Pour débaptiser nos petites villes

La chère vieille rue où mon père avait cru
On ne peut plus propice d'aller construire sa
Petite maison s'appelait rue de l'Hospice

Se mettre en quête d'un nom de rue plus opportun
Ne se concevait pas on ne pouvait trouver mieux
Vu qu'un asile de vieux florissait dans le bas

Les anciens combattants, tous comme un seul, sortant
De leurs vieux trous d'obus, firent tant qu'à la fin
La rue de l'Hospice devint La rue Henri Barbusse

Et j'eus ma deuxième tristesse d'Olympio
Déférence gardée envers le père Hugo

Si faire se peut attendez un peu
Héros incongrus, que l'on soit passé
Pour débaptiser nos petites rues

Moi, la première à qui mon coeur fut tout acquis
S'appelait Jeanne Martin, patronyme qui fait
Pas tellement d'effet dans le bottin mondain

Mais moi j'aimais comme un fou ce nom si commun
N'en déplaise aux minus d'ailleurs, de parti pris
Celle que je chéris, s'appelle toujours Vénus

Hélas un béotien a la place du sien
Lui proposa son blase fameux dans l'épicerie
Et cette renchérie refusa pas, hélas!

Et j'eus ma troisième tristesse d'Olympio
Déférence gardée envers le père Hugo

Si faire se peut attendez un peu
Cinq minutes, non? Gentes fiancées
Que l'on soit passé pour changer de nom


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