Bernard Lavilliers
LA POLITIQUE



Cerclée de portefeuille
Stomacale et livide
Gonflée par l'illusion
Et dévorée par l'art
Vidée par l'insondable
Guidée par la victoire
Elle avance tordue
Sur un rebord de nappe

Avec des gloussements qui ressemblent à des rires
Le crâne luisant fort sur la génuflexion
Elle fait de l'amertume une soeur mobile
Et voie dans sont vieux couple, un semblant de passion

La politique
Avec le geste rare et le regard chagrin
Dans sa fonction assise, comme une courtisane
Elle mâche le destin au milieu des tisanes
Et fait des armatures aux fumées des havanes

Par un rot fabuleux dégueulant sur la vitre
Tout en prenant pour cause une portion d'azur
Purulent de serments et remourant d'ennui ses ongles noirs
S'enfoncent dans les cerveaux trop mure

Puis ses dents jaunes tuent
Les ordres généreux que des fils tordus par l'âge raisonnable
Avaient déposé là étonnés et peureux
Comme la vérité dans le fond d'un cartable

Positive
Inquiète
Boursouflée
Et pourrie
La politique molle s'égoutte sur le banc
Tandis qu'agonissant derrière le mépris
Baconin le rieur écrit son testament


À la page des textes de Bernard Lavilliers
À la page des textes