Richard Gotainer
POLOCHON BLUES



Assis sur le bord de ma couche
Je quitte le traversin
Pour réintégrer les babouches
II est déjà matin.

Coiffé d'une casquette en plomb
La trogne comme un compteur
Je cherche mes esprits à tâtons
Je m'éveille en douleur.

Le pyjama en tire-bouchon
Une flèche dans les reins
Je bougonne et je fais le grognon
Jusqu'à la salle de bains.

Blues blues blues
Polochon blues.

Une haleine à vous tuer un boeuf
Fait s'évanouir ma nuit
La pulmol au coin des yeux
Je renais à la vie.

Une main grattant la tignasse
L'autre le bas du dos
Je fais en me regardant dans la glace
Pipi dans le lavabo.

Hier soir, quelle ambiance y'avait
La vache, qu'est-ce qu'on s'est mis
Maintenant, sur le bord du bidet
Je continue ma nuit.

Blues blues blues
Polochon blues.

Voici l'instant où le réveil
Commence à me gagner
La brosse à dents derrière l'oreille
Je fais chauffer du café.

A quatre pattes, dans la lumière
Blafarde du frigo
Je scrute la denrée nourricière
Par cinq au-dessous de zéro.

Puis vient le moment où la biscotte
Me pète entre les doigts
L'heure où y'a des petits bouts qui flottent
En surface du caoua.

Je te dis, la vie n'est qu'une tartine
Surmontée d'un étron
Prostré dans le fond de la cuisine
J'ai le blues du polochon.


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