Léo Ferré
RAPPELLE-TOI


Rappelle-toi

Cette neige de nuit avec mes cheveux gris
Les chiens qui s'ébrouaient des flocons de tes yeux
Ce rempart d'herbe triste et de moutons anxieux
Cette Alpe camarade accoudée à ton lit

Rappelle-toi

Le sourire de Dieu qu'on touchait de la tête
La montée à la paille avec le vent debout
Et tout debout là-haut la tendresse à genoux
Qui nous rafraîchissait le dos avec nos bêtes

Rappelle-toi

Ces fleurs de la vertu hautaine et leur fumet
Qui ressemble au fumet de tes fleurs de la lune
Et que j'allais chercher comme on cherche fortune
Au bout d'une perdrix que je n'osais tirer

Rappelle-toi

Si je meurs avant toi je veux que vagabonde
Tu souffles un vent de tous les diables au cul des gens
Apprenant notre amour à leur coeur impotent
Et que Dieu voyant ça signe la fin du monde

Rappelle-toi

Et si tu meurs devant je suivrai à la trace
Comme le chien perdu sans collier ni pâtée
Recherche tendrement son chagrin à la place
Où son bonheur si bêtement s'est arrêté


À la page des textes de Léo Ferré
À la page des textes