Georges Brassens
LES VOISINS



Si j'étais tout-puissant demain
Je n'irais pas par quatre chemins,
Et ferais passer par le fer
Tous les voisins de l'univers.
Dans un moment, quand vous saurez
Tout ce qu'ils me font endurer,
Vous direz en votre âme: "Il a
Raison de vouloir être Attila."

REFRAIN:
Les voisins sont tous des sale s types
Les voisins sont tous des sale s gens.

Ces gens auxquels je n'ai rien fait,
Auxquels je montre un tact parfait,
Passent leurs jours, passent leurs nuits
A me susciter des ennuis.
Ils possèdent un Mistigri
Qui croque toutes les souris,
Sauf les miennes bien entendu
Car ils le lui ont défendu.

REFRAIN

Mais en revanche il prend bien soin
De ne pas faire ses besoins
Ailleurs que sur mon paillasson,
Comme on lui en fit la leçon,
Et puis ils vont criant partout
Si je jette la pierre au matou:
"Il met ça sur le dos du chat,
Mais c'est lui qui se soulagea!"

REFRAIN

Et dans tout le quartier bientôt,
Je passe pour un Hottentot
Qui s'acharne à souiller, souiller
Les paillassons mal surveillés.
Lors quand je vais déambulant,
Chacun me fait l'affront sanglant
De mettre au fur et à mesure
Tous les paillassons en lieu sûr.

REFRAIN

Ma grand-mère âgée de cent ans
M'adore et vient de temps en temps
Faire un séjour en ma demeure.
Ils trouvent ça contraire aux moeurs,
Ils font entendre à mots couverts
Que je suis un affreux pervers,
Un incestueux garnement
Qui couche avec sa grand-maman.

REFRAIN

Et, comme pour les paillassons,
Tous les crétins à l'unisson,
Afin de m'empêcher de les violer
Mettent leurs grand-mères sous clef.
En outre, la société
Protectrice des vieux maltraités
Me combat de tout son pouvoir
Et m'inscrit sur sa liste noire.

REFRAIN

Ayant un jour lavé mes pieds,
J'attendais la femme d'un pompier,
Sûr d'abuser d'elle à huis clos.
J'avais compté sans ces salauds.
Comme dans le couloir il faisait nuit
Et qu'elle ne trouvait pas mon huis,
Elle alla tirer par erreur
Le cordon de mes dénigreurs.

REFRAIN

Ils lui répondent: "Ce citoyen
Habite le taudis mitoyen,
Mais quand vous sortirez de chez lui
Portez donc vos pas à Saint-Louis."
Alors ma visiteuse, à corps
Perdu, partit et court encore,
Et je dus convenir enfin
Que j'avais lavé mes pieds en vain.

REFRAIN

L'affaire ne se borna pas là,
De nouveau, tout le monde en parla,
Et les sapeurs-pompiers de Paris
Me clouèrent au pilori.
Ils retirèrent par précaution
Leurs femme s de la circulation
Et promirent d'être sans émoi
Si jamais le feu prenait chez moi.

REFRAIN

Je passe ainsi pour un garçon
Qui s'oublie sur les paillassons,
Qui viole les vieilles grand-mères,
Qui contamine les pompières.
Maintenant que vous savez tout,
Vous donnez votre accord sans dou-
Te à mon zèle exterminateur
De cette bande d'emmerdeurs.
Et comme on n'en finirait plus
Permettez qu'ici je conclue
En sonnant encore le tocsin
Contre l'engeance des voisins.


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